Nous pourrions en rester à une telle interprétation, mais il est beaucoup plus intéressant d'y lire un message assez simple envoyé par Bowie, si on veut bien admettre une strate supplémentaire de sens.
La messe est dite : le minotaure tel qu'il est présenté dans le clip, divinisé par des adeptes, renverrait à l'essence du satanisme.
Mais en rester là consisterait à donner un simple aval à cette fascination exercée sur les membres du culte, soit en la glorifiant, soit en la dénonçant.
Or, on ne trouve rien de tel dans le clip : l'aspect enthousiaste est strictement équilibré par l'aspect répugnant, sans que l'un d'eux prédomine. 2
Seule plane, surplombe, cette fascination, lourde de sens dans une atmosphère des plus pesantes.
En associant le Minotaure à l'Artiste, Bowie nous livre sa version du satanisme : l'inverse du crime nécessaire et conscient de lui-même, propre à tout art, consubstantiel à la vie.
Car la première leçon ordurière du cœur est celle de l'art. 3
La seconde leçon répugnante est celle de l'artiste devenant une idole à laquelle ses admirateurs vouent un culte.
Et la troisième leçon dégoûtante redouble la première : inverser ce crime nécessaire et conscient en un crime superflu. Transformer la nature de « crime-art » de tout art en un « art-crime » autant inutile qu'apparemment inoffensif.
1 Son association à Ramona A. Stone, dans l'intrigue meurtrière, fait de lui un artiste, un créateur.
2 D'où l'absence d'opinion décelable chez Bowie quant à la résurgence du paganisme. Bien malin qui pourrait dire s'il voit là une tendance régressive, ou une libération des carcans traditionnels.
Il ne peut s'empêcher d'en parler au fil des interviews car lui-même éprouve cette fascination et, traversé par des sentiments ambigus, « pousse le bouchon plus loin », s'en faisant le promoteur.
3 Lire notre essai : « Arts Filthy Lesson ».